Légende de Pyrène L'Or de l'Ariège

       

La Préhistoire

 

    La vallée de Bethmale est connue pour ses légendes et notamment celles sur  les sabots et sur le costume traditionnel.

 

Les Maures envahirent le Midi de la France et surtout les Pyrénées au IXe siècle. Ils occupèrent la vallée de Bethmale sous la conduite de leur chef "Boabdil". Le fils du chef s'éprit de la plus jolie fille du val. Elle s'appelait "Esclarlys", ce qui signifie "teint de lys sur fond de lumière". Esclarlys était déjà fiancée au pâtre chasseur d'isards "Darnert". Ce dernier s'était retranché dans la montagne avec ses compagnons pour organiser une vengeance.

    Darnert déracina deux noyers dont la base formait un angle droit avec les racines. A l'aide d'une hache et d'un couteau, il tailla et creusa une paire de sabots (esclops) ayant la forme d'un croissant de lune avec une longue pointe effilée comme un dard. Puis un jour, les pâtres, Darnert à leur tête, firent retentir les "hillets" et livrèrent un rude combat d'où ils sortirent vainqueurs. Puis ils défilèrent dans le village. Darnert, chaussant ses sabots à longues pointes, avait accroché le coeur de la bethmalaise infidèle à gauche et celui du Maure à droite.

 

    Depuis ce temps-là, le soir de Noël, le fiancé offre à sa fiancée une paire se sabots à longues pointes, habillés de cuir et richement décorés de pointes dorées dessinant un coeur (sur le dessus du sabot). Il offre aussi une quenouille rouge et un fuseau, le tout fabriqué avec tout son amour, plus la pointe des sabots est longue, plus l'amour est ardent. En retour, la fiancée lui offre un tricot en laine brodé de velours et une bourse empanachée de rubans, de paillettes ou de jais.

Cric-crac, moun coundé es acabatch !

 

 

Si vous pointez avec la souris les mots soulignés, leur traduction apparaitra.

 

 

    C'était un soir d'été, vers 1600... Du col de la Core au fond de la vallée, la paix s'étendait doucement... Les loups n'étaient pas encore en chasse et les rares bergers avaient rassemblé hâtivement leurs maigres troupeaux dans les "barguéros déras oueillos"  aidés par les chiens vigilants qui portaient à leur cou le redoutable "escouraous".

    C'était l'heure où les sonnailles s'apaisaient lentement. Assis devant les "bourdaous", puisant parcimonieusement dans le "tusset" un peu de  "hourmadgé routch"  les bergers prenaient leur frugal repas avant de prendre un repos bien gagné sur le "ténis" fait de branches de sapin...

    ... et c'est alors qu'une rumeur étrange arriva peu à peu... s'amplifia, incompréhensible : elle venait du col de la Core : du bruit, des cris, des cliquetis, la peur s'empara de ces êtres simples, les cloua sur place dans un débordement de signes de Croix. Ils attendaient, marmonnant des prières, regardant sans comprendre.

"Moun Diou det Cèou !! Yo imbasio !!"

    La rumeur bougeait, se découpait dans le ciel sur le sentier étroit venant d'Espagne et peu à peu surgit une file de chevaux lourdement chargés, petits, trapus, crinières et queues au vent.

    Un ordre bref, toute la caravane fit halte. Un homme s'avança, richement vêtu. Il s'arrêta, ému, devant les bergers et leur parla dans leur langue :

"Adissiats toutis ! E noun conéchès cap ? Jouanissou !!"

    Le sang remonta au coeur des bergers et tous l'entourèrent, heureux de revoir celui qui était parti depuis si longtemps.

    Il avait bien changé, Jouanissou, depuis qu'il avait quitté la vallée pour suivre une troupe de marchands qui s'en revenait en Grèce. Là, comme tous les montagnards, il s'était vite habitué aux coutumes de ces peuples. Le commerce l'avait enrichi et il avait suivi la coutume des envahisseurs Turcs : il avait son harem.

    Mais le mal du pays le prit et il décida de revenir chez lui en commerçant. Il choisit alors 12 de ses plus belles femmes, 30 de ses chevaux les plus endurants et 12 de ses plus belles chèvres et se mit en route avec ses nombreux bagages et serviteurs, maintenant, il était heureux d'être enfin arrivé.

 

    Toute la vallée lui fit fête : il établit son premier camp sur un promontoire d'où l'on pouvait surveiller toute la vallée. C'est aujourd'hui l'emplacement du village de "Villargein".

     Peu à peu, les fils, les filles, les petits-fils, arrière-petits-fils peuplèrent toute la vallée. Ces mariages consanguins gardèrent aux habitants une pureté de ligne, une beauté longtemps gardée, enrichie encore par le costume si beau et si riche en couleurs et broderies.
   
Ils cultivèrent le chanvre et le lin, tissèrent leurs étoffes et restèrent ainsi maîtres chez eux dans la même pureté sanguine.

    Les quelques chèvres de race pure qu’ils avaient amenées de Grèce se multiplièrent aussi et l’on pouvait en compter plus de 6000 dans la vallée.

    Tout était prospère et ils auraient pu être heureux.

    Hélas, ces mœurs inaccoutumés scandalisèrent les habitants des vallées voisines, qui mirent la vallée au ban de l’humanité et nommèrent la vallée "Vallée maudite" ce qui isola encore plus ses habitants.

    C’est peut-être pour cela que les habitants ont encore le joli costume que personne d’autre ne porte dans la région et qu’on les appelle des "Bethmalais" !

 

 

Cric-crac, moun coundé es acabatch !

Extrait de : La vallée de Bethmale Légendes, Souvenirs, Réalités (J.BEGOUEN, 1996)

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